Peut-on cumuler le statut de travailleur autonome avec un autre ?

Par Bruno Maniaci

Partir sa business en travailleur autonome pour s’arrondir les fins de mois et financer des projets, payer des dettes, ou simplement développer une nouvelle expérience.

Que le projet vous tente ou que vous soyez déjà dans cette situation, vous vous êtes sûrement interrogé sur la possibilité de cumuler le statut de travailleur autonome avec un autre, comme être salarié par exemple.

Quelles sont les conséquences légales et fiscales? Comment gérer sa déclaration de revenus?

Plusieurs points sont à prendre en compte dans l’optique de cumuler une activité d’entreprise individuelle avec un autre statut.

Car même si vous êtes salarié à temps plein, le moindre revenu supplémentaire déclaré d’une source de travail autonome vous donnera certaines obligations fiscales.

statut de travailleur autonome

Cumuler le statut de travailleur autonome : avec quel autre statut?

Faisons tout d’abord un tour d’horizon des différentes situations. Il est possible de devenir travailleur autonome tout en ayant un autre statut : en étant aux études ou déjà employé par exemple, cumulant une activité à temps partiel en freelance.

Essayons de regarder plusieurs cas de figures, pour se rendre compte des associations évidentes ou non.

 

Étudiants : Si son emploi du temps est propice et qu’il arrive à exploiter une entreprise individuelle à côté de ses études, un étudiant peut cumuler son statut à l’école et devenir travailleur autonome à côté.

Cela peut-être un moyen intéressant de se faire une expérience, un revenu supplémentaire, et pourquoi pas de se lancer en affaire en attendant de finir son diplôme!

Avec le risque de devenir trop occupé par son activité pour bien étudier! Plusieurs entrepreneurs à succès n’ont pas eu le temps de finir leurs études, victimes du succès de leur entreprise indépendante.

 

Salariés : Un salarié d’une entreprise peut tout à fait cumuler une activité professionnelle de travailleur autonome si son emploi du temps le lui permet.

Cela peut lui permettre de commencer une autre activité en parallèle de son emploi principal. Soit par passion pour un projet, ou par complément de revenu.

Comme par exemple devenir chauffeur pour Uber les soirs et fins de semaine.

C’est du côté de la déclaration d’impôt que les choses se compliqueront, puisqu’il faudra jongler avec les différents revenus à déclarer. Et c’est ici que certains pièges seront à éviter.

 

Contrairement aux employés qui payent des cotisations sociales directement prélevées sur leur salaire, un revenu de travail indépendant n’est pas taxé et prélevé à la source, l’impôt sera calculé et prélevé après la déclaration de revenu.

L’appel à un comptable peut-être de mise, dans le cas où on conserve son statut de salarié tout en devenant travailleur autonome.

Surtout que, comme nous le verrons après, le cumul des revenus pourrait faire augmenter l’impôt.

 

Retraités : Cumuler le statut de retraité avec celui d’auto-entrepreneur : est-ce qu’on peut se lancer dans une activité de travailleur autonome lorsqu’on est à la retraite?

Se partir un petit projet pour rester occupé avec un revenu supplémentaire? Rien ne vous l’interdit bien sûr d’un point de vue administratif ou légal, mais c’est au niveau des impôts et des cotisations que la question se pose : l’ajout d’un revenu imposable en plus de votre retraite pourrai avoir un impact sur la cotisation de vos REER mais aussi sur le montant de la RRQ et de la pension de la Sécurité de vieillesse du Canada.

Ainsi, tout dépendra de votre situation financière et de votre retraite. Il est vivement recommandé de consulter un conseiller financier avant d’envisager de se lancer comme travailleur autonome.

 

Chercheurs d’emplois / Prestataires de l’assurance emploi : Lorsque vous recevez une prestation de l’assurance emploi comme le chômage ou le bien-être social, vous êtes tenus de déclarer chaque mois votre situation ainsi que vos revenus.

Si vous démarrez une activité de travailleur autonome et percevez des revenus, vos aides seront recalculées, et vous pourriez voir vos prestations réduites ou plus probablement supprimées, à moins que ce revenu ne soit très négligeable.

Ce n’est donc pas une situation idéale pour cumuler ce statut.

 

Immigration et travail autonome : Cumuler un visa de travail avec le statut de travailleur indépendant? Toute personne autorisée à travailler sur le territoire canadien peut monter son entreprise individuelle et devenir travailleur autonome.

Vous devez avoir un permis de travail ouvert pour pouvoir devenir travailleur autonome, c’est-à-dire un permis qui n’est pas assigné à une seule entreprise, comme par exemple le visa Jeunes Professionnels, qui ne vous autorise pas à avoir d’autre activité.

Un visa ouvert sera requis, comme un Permis Vacances Travail (PVT), un permis de travail ouvert comme conjoint de fait, ou encore un visa de résident permanent.

 

Immigrer directement comme travailleur autonome : Avec la démocratisation récente du statut de travailleur autonome, le Ministère de l’Immigration du Québec a mis en place un Programme des Travailleurs Autonomes, permettant à des professionnels d’autres pays d’obtenir un visa de travail avec ce statut. Plus de renseignements sur le site d’Immigration Québec

 

statut de travailleur autonome

Cumuler deux revenus : les conséquences

Nous avons constaté qu’il est possible de cumuler le statut de travailleur autonome avec plusieurs autres statuts.

Il est donc possible de monter une entreprise individuelle et devenir travailleur autonome tout en ayant un autre revenu à côté, comme par exemple en étant salarié, employé d’une entreprise.

En 2019, près de 200 000 québécois et québécoises cumulaient plusieurs emplois.

Intéressons-nous maintenant aux conséquences du cumul de plusieurs revenus, celui du travail indépendant, et celui du travail d’employé.

Plusieurs implications légales et pièges fiscaux pourraient se profiler, et il est vivement conseiller de prendre l’avis d’un spécialiste en fiscalité et compatibilité pour ne pas se faire piéger.

Car chaque situation sera différente, surtout selon les montants.

 

Changer de tranche d’imposition : Si votre revenu annuel augmente, peu importe les sources, vous serez imposé sur le total de ce revenu.

Par exemple si un emploi salarié vous donne 30 000$ par année mais que vous cumulez en ajoutant un 10 000$ de chiffre d’affaire provenant d’une activité de travailleur autonome, vous serez imposé sur 40 000$, et vous pourriez vous voir payer plus d’impôts, même si le revenu de salarié est prélevé à la base.

Il faut donc être vigilant et prévoir de mettre de côté pour payer un éventuel impôt supplémentaire.

 

Pour connaître plus en détail les taux et paliers d’imposition sur le site de l’Agence du Revenu du Canada

 

Les choses se compliquent car un travailleur autonome dont le revenu est égal ou au-delà de 30 000$ de chiffre d’affaire par année est tenu de collecter la TPS et la TVQ, en plus de devoir s’inscrire au registre des entreprises.

Car un autre piège se profile au niveau fiscal : si vous partez une entreprise individuelle, même à temps partiel, vous devenez considéré comme entrepreneur indépendant, et vous pourriez devoir respecter les mêmes exigences fiscales qu’une entreprise individuelle à temps plein.

Ce qui pourrait ne pas être avantageux lorsque vient la déclaration de revenus et l’imposition.

De plus, on peut mentionner l’application éventuelle des acomptes provisionnels, une forme d’impôt anticipé qui peut s’appliquer aux travailleurs autonomes selon leur revenu annuel. Une dépense et un impôt supplémentaire à prévoir.

 

Plus de détails sur les acomptes provisionnels pour travailleurs autonome sur le site de Revenu Québec

 

Allocations et crédits d’impôt : Que ce soit du côté fédéral ou provincial, un revenu de travailleur autonome cumulé avec un autre pourrait avoir une influence sur des prestations et allocations, qui pourraient alors vous être diminuées ou retirées.

Nous l’avons vu précédemment avec le cas des retraites, mais on peut aussi mentionner plusieurs allocations comme le crédit d’impôt solidarité, le crédit pour la TPS ou encore l’Allocation Canadienne pour Enfants.

Et comme évoqué précédemment, si vous êtes retraité, vous pourriez voir une incidence sur votre allocation retraite à cause d’un revenu de travailleur autonome. Même cas de figure pour un prestataire de l’assurance-emploi.

D’où l’importance de bien calculer et anticiper un revenu supplémentaire, car vous pourriez avoir de mauvaises surprises après votre déclaration de revenus et réaliser que le cumul de revenus pourrait ne pas valoir le coup.

statut de travailleur autonome

Les solutions pour cumuler deux revenus

Cependant, et selon le cas et contexte, il existe plusieurs moyens de gérer ce cumul de revenus sans se retrouver dans une mauvaise situation, ou avoir trop d’impôts à payer, ou se voir retirer de précieuses aides et crédits d’impôt.

 

Dépenses déductibles : Pour faire baisser votre revenu imposable, vous pouvez déclarer une partie des dépenses liées à votre activité de travailleur autonome, car un travailleur indépendant, par définition de Revenu Québec notamment, est propriétaire des outils de travail.

Par exemple, l’achat de fournitures du bureau si vous exercez cette activité depuis votre domicile, les déplacements liés aux relations d’affaires, ou encore l’achat de matériaux nécessaires aux créations que vous vendez dans votre entreprise individuelle, comme une boutique en ligne d’artisanat par exemple.

Si votre activité de travailleur autonome génère 15 000$ mais que vous justifiez 2500$ de dépenses, vous ne serez imposé que sur 12 500$.

Attention cependant aux proportions déclarables, car si vous cumulez avec une activité de salarié, ce ne seront que les dépenses liées à l’activité de votre entreprise individuelle qui seront justifiables.

Comme les courses de Uber si vous êtes chauffeur les soirs et fins de semaine, et non pas vos trajets à votre travail salarié.

 

Pour en savoir plus sur les dépendes déductibles, voici le lien vers le site de Revenu Québe

 

Cotiser et épargner : Une autre manière de réduire les revenus imposables est faire des cotisations libres d’impôts, comme un régime épargne-retraite (REER) ou à des comptes d’épargne libres d’impôts (CELI).

Mais encore une fois, des calculs s’imposent au cas par cas pour bien gérer les montants épargnés et arriver aux bonnes déductions, ne pas dépasser certains montants, etc.

 

Consulter un spécialiste en fiscalité : Vous l’aurez compris, le cumul de deux revenus, notamment celui provenant d’une entreprise indépendante, nécessite une planification fiscale rigoureuse, et elle demande une étude au cas par cas pour comprendre, calculer, étudier et finalement décider de la meilleure stratégie à adopter.

Ne serait-ce que pour estimer si oui ou non, et dans quelles mesures et montants il est intéressant de cumuler le statut de travailleur autonome avec un autre dans votre situation personnelle.

 

Le cumul des statuts : avec précautions

Alors peut-on cumuler le statut de travailleur autonome avec d’autres statuts de travail? Être salarié et à son propre compte à la fois?

Oui, c’est faisable légalement au niveau de l’exercice de l’activité, d’un point de vue administratif, ou des conditions de travail, que ce soit en étant étudiant ou salarié par exemple.

Que ce soit pour augmenter son revenu avec un contrat de travail indépendant, ou pour démarrer sa micro-entreprise, un projet de quelques heures de travail en plus par semaine qui pourrait vous rapporter plus.

Cependant, c’est du côté de la fiscalité et des impôts que la question devient délicate, et qu’il devient nécessaire de bien étudier sa situation pour calculer et anticiper certaines conséquences et pièges fiscaux éventuels, comme la suppression d’allocations ou l’augmentation des impôts.

Il existe cependant plusieurs solutions pour optimiser le cumul de deux statuts et donc de deux revenus, comme les cotisations et épargnes libres d’impôts ou la déclaration de dépenses liées à l’activité pour faire baisser le revenu imposable.

Il est donc vivement conseillé de se renseigner et creuser chaque détail de votre situation, notamment en faisant appel à un spécialiste en fiscalité, un conseiller financier, pour établir la meilleure stratégie avant de se lancer.

 

Liens utiles :

Détermination des statuts selon Revenu Québec

À LIRE AUSSI

Laisser un commentaire

* En utilisant ce formulaire, vous acceptez le stockage et le traitement de vos données par ce site web.