Travailleur autonome : s’incorporer ou non, telle est la question !

Par Bruno Maniaci

Que vous vous lanciez dans l’aventure de travailleur autonome ou que vous soyez déjà établi, vous rencontrerez forcément ce dilemme : devrais-je m’incorporer ou non ?

Rester à mon compte individuel ou créer une société qui soit une entité juridique à part entière ?

Plusieurs éléments sont à prendre en compte en fonction de votre situation et de vos objectifs.

Nous avons voulu rassembler toutes les informations utiles pour vous aider à mieux comprendre les enjeux, et vous guider pour prendre la meilleure décision pour la suite de votre carrière de travailleur indépendant.

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La différence entre les 2 statuts

Il convient tout d’abord de rappeler en quoi ces deux situations consistent, et leur différence majeure dans la forme juridique : la dissociation entre le travailleur comme personne individuelle et sa compagnie comme une entité légale séparée, représentée alors par une personne morale.

Travailleur Autonome : vous êtes à votre propre patron, à votre compte personnel, vous facturez vos prestations de travail à votre nom, votre entreprise individuelle.

Vous encaissez les revenus à votre nom directement dans votre compte, et votre revenu net, après dépenses déductibles, figurera sur votre déclaration d’impôt personnelle. Vous êtes responsable de votre compagnie à 100%.

Travailleur autonome incorporé : vous possédez votre société incorporée et facturez par celle-ci.

Vous déclarez ainsi deux revenus séparés : votre impôt personnel, et celui de votre société, qui peut par exemple vous verser votre salaire.

Votre responsabilité personnelle est détachée de celle de votre entreprise.

Ainsi c’est principalement au niveau fiscal et légal que vont se jouer les arguments qui feront pencher votre balance d’un côté ou de l’autre.

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Les avantages et inconvénients

 

1 – Les avantages du travailleur autonome

Autonomie totale : c’est vous qui gérez tout de A à Z, pas d’intermédiaires, d’actionnaires, pas de zones inconnues, vous êtes en contrôle total de tout ce qui se passe dans votre activité, des dépenses aux profits qui sont directement à votre charge.

Chaque décision, chaque changement, chaque intervention est entre vos mains.

C’est la définition même de l’indépendance et de la liberté, qui attire beaucoup de monde vers le statut de travailleur autonome.

Au Québec en 2019, on comptait près de 568 000 travailleurs autonomes, et environ 15% de la population active au Canada.

Déduction de dépenses personnelles liées à l’activité : travailler à son compte, c’est bénéficier de certains avantages fiscaux, comme pouvoir déduire ses dépenses liées à l’activité exercée.

Comme par exemple une partie de votre hypothèque et de vos factures si votre bureau est à la maison. Vos déclarations d’impôts seront aussi relativement simples comparées à celle d’une société incorporée.

Pas besoin d’être inscrit au registraire des entreprises : Si votre revenu annuel de travailleur autonome est inférieur à 30 000$ CAD par année, vous n’aurez pas besoin de vous déclarer au registre des entreprises du Québec et il ne sera pas nécessaire d’inclure la TPS et la TVQ sur vos factures, ce qui simplifie beaucoup de choses en papiers, administration et comptabilité.

 

2 – Les désavantages du travailleur autonome

Responsabilité personnelle : en cas de problèmes comme une faillite, le travailleur individuel est personnellement responsable, ce qui pourrait entrainer par exemple la saisie de biens personnels.

On peut le voir comme le prix à payer pour la liberté et l’indépendance totale : la responsabilité totale.

Impôt progressif aux particuliers: lorsque vous êtes employé, votre salaire est un revenu net, où les impôts sont déjà déduits. Lorsque vous êtes travailleur autonome, ce sera à vous de déduire ces impôts de votre propre revenu.

Plus le chiffre d’affaire est élevé, plus cet impôt pourra être élevé. Il est ainsi important de systématiquement mettre de côté pour cet impôt.

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3 – Les avantages de l’incorporation

Protection : Pas de responsabilité directe en cas de faillite de l’entreprise. Ainsi en cas de problèmes, votre patrimoine personnel ne sera pas menacé.

Les dettes s’appliqueront à la compagnie, et non à votre personne individuelle, sauf en en cas de caution personnelle. Vous êtes donc mieux protégé contre le risque financier.

Avantages fiscaux propres aux sociétés : Taux d’imposition moindre, opportunité de laisser des revenus nets dans la société par actions, devenir actionnaire, verser des dividendes, ou encore élaborer des stratégies fiscales avec d’autres actionnaires : ce sont plusieurs possibilités qui peuvent vous faire considérer l’option de l’incorporation, du point de vue de la fiscalité.

Financement : Une institution financière pourrait vous accorder plus facilement un prêt grâce au statut d’entreprise incorporée.

Puisque par exemple en cas de dettes, celles-ci ne seront pas au nom de la personne individuelle.

L’incorporation pourrait ainsi être intéressante pour faire certaines demandes de subventions ou financement, dans le sens ou une entreprise incorporée peut avoir un statut plus important qu’un travailleur autonome individuel auprès de certaines institutions.

Crédibilité et confiance du public : On ne va pas se le cacher, avoir un nom d’entreprise déclaré, et notamment le fameux « inc. », c’est jouer dans une autre catégorie.

Vous pourriez prétendre à de plus grands projets et bénéficier d’une crédibilité supérieure en termes d’image de marque, que ce soit auprès de partenaires ou de clients.

Pérennité et futur : En étant incorporé, vous pourriez éventuellement envisager une croissance importante de votre entreprise, comme par exemple avoir des employés à l’avenir, ou même de pouvoir revendre votre entreprise dans quelques années.

 

4 – Inconvénients de l’incorporation

Frais de gestion élevés : de l’immatriculation de l’entreprise aux frais de gestion obligatoire divers comme la tenue de cahiers et l’écriture de règlements, le recours nécessaire aux services d’avocats ou de comptables agréés : il faut être conscient que cette incorporation aura un certain coût, estimé entre 1000$ et 3000$ pour la première année, et d’autres frais courants annuels par la suite.

Complexité de la gestion et des papiers : s’incorporer, c’est aussi s’engager dans un niveau supérieur d’administration et de paperasses : formulaires, comptabilité, tenue de comptes, relevés, déclaration de revenus.

Le prix à payer sera aussi une gestion plus complexe, nécessitant parfois d’engager comptables ou avocats agréés.

Moins d’autonomie : Avec l’intervention et l’implication de tierces personnes dans la gestion de la société, et la complexité de certaines démarches, l’autonomie à titre personnel est en quelque sorte réduite, en comparaison avec le travailleur autonome individuel.

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Se lancer : comment ça marche ?

 

1 – Démarrer son activité de travailleur autonome

C’est plutôt simple pour débuter, selon votre activité vous pourriez commencer aujourd’hui !

Il vous suffit de facturer vos prestations à vos clients, en votre nom.

Lors de votre déclaration d’impôts, vous déclarerez votre revenu total découlant de vos activités de travailleur autonome.

Vous pourrez déduire certaines dépenses reliées au travail avec le formulaire TP-80.

Quelques ressources pour se lancer en travailleur autonome :

– Une vidéo pour se lancer

– Une conférence plus approfondie sur le sujet avec la journaliste Martine Letartre

– Une explication détaillée des revenus de travailleur autonome

 

 2 – S’incorporer : monter votre société

Avant de commencer une activité en tant que société incorporée, certaines démarches légales et administratives sont nécessaires.

Notamment choisir la dénomination sociale de la société, créer les statuts constitutifs pour la structure de l’entreprise, choisir des actionnaires, choisir l’adresse du siège social et du premier conseil d’administration, puis soumettre une demande en ligne et payer les frais d’immatriculation.

Une autre question se pose ici : s’incorporer au fédéral ou au provincial ? C’est un autre débat dont voici un rapide aperçu dans cette vidéo.

Quelques vidéos utiles sur l’incorporation :

 

Conclusion et conseils

Vous l’aurez compris : s’incorporer pourra vous ouvrir des portes vers des projets de plus grande envergure, même si la gestion sera plus compliquée et coûteuse que celle de travailleur autonome, comme notamment les déclarations de revenus où vous devrez sûrement faire appel à un fiscaliste.

Vous pourriez avoir moins d’indépendance, mais plus d’ouvertures et de perspectives futures sur un point de vue entrepreneurial, ou avoir plus de pouvoir auprès des institutions financières pour envisager des investissements.

Selon plusieurs experts financiers, l’incorporation serait à envisager si votre activité de travailleur autonome génère des revenus assez importants pour être épargnés dans le compte de l’entreprise, sans être dépensés immédiatement.

Ou si votre chiffre d’affaire grandit significativement, que vous envisagez d’avoir des employés à l’avenir.

Ou encore si votre activité nécessite beaucoup d’investissements et de dépenses, justifiant l’utilisation active d’un compte de société séparé du compte personnel. Dans tous les cas il convient de bien étudier ses états financiers avant de se lancer.

 

Pour approfondir un peu le sujet et la question de l’incorporation :

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